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Le gaspillage alimentaire dans la distribution, un fléau à combattre

Écrit par semo.epicerie
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1 mai 2021
1,4 million de tonnes. Ce chiffre, issu d’une étude de l’ADEME publiée en 2016, représente l’ampleur du gaspillage alimentaire généré par le secteur de la distribution chaque année. C’est pourtant cette même année que la France s’est engagée à combattre ce fléau au travers du Pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire. Qu’en est-il aujourd’hui ? Sommes-nous face à de réels changements ?
Un constat alarmant, des mesures à prendre

Revenons dans un premier temps sur la définition du gaspillage alimentaire. Car avant de parler de cette problématique, il faut savoir de quoi il en ressort. Selon la définition retenue dans le pacte national « anti-gaspi’ » de 2013, le gaspillage alimentaire désigne « toute nourriture destinée à la consommation humaine qui, à une étape de la chaîne alimentaire, est perdue, jetée ou dégradée ».

Ainsi, détourner des invendus des supermarchés vers l’alimentation animale ou encore méthaniser des fruits et légumes jugés trop moches pour en créer de l’énergie, sont autant de pratiques considérées comme étant du gaspillage alimentaire même si elles représentent des solutions pour éviter l’incinération ou l’enfouissement des denrées.

Contextualisons cette problématique que représente le gaspillage alimentaire dans le secteur de la distribution. Lorsque l’on parle de distribution, il s’agit des marchés locaux, nationaux et de toutes les tailles de commerces alimentaires.

Ainsi sur l’ensemble de ces acteurs, 1,4 million de tonnes de produits sont jetées, soit l’équivalent de 2,8 milliards de repas de 500 g qui étaient consommables et qui n’ont finalement pas été consommé. Bien que la quantité de gaspillage varie d’un acteur à l’autre, le gaspillage du secteur de la distribution représente 14 % de l’ensemble du gaspillage alimentaire en France.

Les pertes alimentaires désignent l’ensemble de la nourriture perdue durant toute la chaîne d’approvisionnement, qui va du producteur au (super)marché.

Aux champs, les agriculteurs se voient obliger de jeter des denrées pour diverses raisons (défaut d’aspect, calibre trop gros ou trop petit, forme ne correspondant pas aux critères de commercialisation, surproduction, retours de livraison, etc.).

D’après une étude de l’ADEME, ce gaspillage représente, en volume, 32% du gaspillage généré sur toute la chaîne alimentaire.

Voici une infographie réalisée par FNE (France Nature Environnement) pour illustrer le sujet.

Illustration : FNE
Des enjeux écologiques, économiques et éthiques

De cette masse de denrées jetées, perdues ou dégradées, il faut en tirer des conclusions sur notre façon de produire de la nourriture.

Lorsqu’un tiers* des aliments produits sur la planète est jeté alors qu’une personne sur six souffre de sous-nutrition et que d’importantes ressources (énergie, eau, espaces agricoles, etc.) sont utilisées pour rien, cela pose des problèmes éthiques, écologiques et économiques considérables.

Le coût environnemental du gaspillage alimentaire est colossal, tant en termes de ressources naturelles que de pollutions liées à la production des aliments (utilisation des pesticides, engrais chimiques, etc.). D’après l’ADEME, l’empreinte carbone annuelle du gaspillage alimentaire serait de près de 15,5 millions de tonnes de CO² par an en France.

Au premier regard, ce qu’on a peu de mal à identifier en pénétrant dans La Recyclerie, c’est le café-restaurant. Une immense salle au décor ancien et vintage se dresse derrière le comptoir ouvert. A l’étage, une mezzanine surplombe le tout laissant imaginer la hauteur du bâtiment et ses magnifiques armatures en fonte. Souhaitant proposer une alimentation saine, durable et locale, le restaurant porte l’ensemble du projet associatif de La Recyclerie. C’est là que Sinny & Ooko fait preuve d’ingéniosité dans son approche puisque les recettes du restaurant permettent de financer toutes les activités annexes, elles, totalement gratuites.

Toutes ancrées autour de la sensibilisation aux valeurs de l’écologie et de notre responsabilité dans son maintien, ces activités prennent plusieurs formes et sont entièrement gérées collectivement par Les Amis Recycleurs, une association de près de 400 adhérents.

À l’échelle planétaire, si le gaspillage alimentaire était un pays, ce serait le troisième plus gros émetteur de GES (Gaz à effet de serre) après les États-Unis et la Chine. Par ailleurs, 28 % des terres agricoles servent à produire des aliments qui finissent à la poubelle.

Et les chiffres sont tous alarmants. Sur la gestion de l’eau, c’est 250 km3 qui sont utilisés chaque année dans le monde pour produire de la nourriture gaspillée, soit près de 5000 fois la consommation annuelle moyenne d’un français.

Côté énergie, tout au long de la chaîne alimentaire, de l’énergie est gaspillée et enfin le parcours des aliments n’est pas en reste. Il faut faire rouler des camions, des voitures et voguer des bateaux. Un yaourt à la fraise peut parcourir jusqu’à 9000 km du producteur à la bouche du consommateur.

Photo : Mathilde Bouterre

Mais il n’y a pas que la question écologique qui est à soulever. Le gaspillage alimentaire, c’est aussi comme nous l’évoquions plus haut, un véritable scandale éthique et social.

4 millions de Français obtiennent des aides et reçoivent des repas chaque année pour subvenir à leurs besoins vitaux. Une lutte à la source du gaspillage permettrait d’économiser les ressources, mais également de réduire le prix des denrées et de favoriser leur qualité.

Enfin, le gaspillage alimentaire engendre d’énormes pertes financières. En France, selon l’ADEME, le coût du gaspillage des denrées du champs à la poubelle représenterait 16 milliards d’euros annuels, soit 240 € par an et par personne.

Certes la distribution ne représente que 14 % de ces pertes écologiques, sociales et économiques, mais il n’en reste pas moins que des solutions et des mesures doivent être adoptées afin de changer la donne.

*d’après la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture)

Lutter contre le gaspillage alimentaire, de la gestion des invendus aux dons aux plus démunis

La loi Garot du 11 février 2016 qui vise à lutter contre le gaspillage alimentaire souhaite impliquer et responsabiliser l’ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire. Elle hiérarchise les actions de lutte contre le gaspillage alimentaire dans l’ordre suivant :

 1. La prévention du gaspillage alimentaire,

2. L’utilisation des invendus propres à la consommation humaine, par le don ou la transformation,

3. La valorisation destinée à l’alimentation animale,

4. L’utilisation à des fins de compost pour l’agriculture et la valorisation énergétique, notamment par méthanisation.

 

Nous n’allons pas présenter toutes les solutions et les acteurs œuvrant pour lutter contre le gaspillage alimentaire, car il en existe de nombreux qui se sont attaqués à cette question sur les différents pans présentés dans la hiérarchie ci-dessus. Des acteurs qui préviennent comme l’ADEME, FNE ou l’association Zero Waste France et qui sensibilisent et accompagnent au changement des pratiques, des associations qui récupèrent les invendus comme les Restos du Cœur, ou encore des organisations qui récupèrent et valorisent les déchets alimentaires comme Les Alchimistes.

Sur le sujet de la distribution, l’ADEME a édité un guide que vous pouvez retrouver ici qui vise à accompagner les GMS (grande et moyenne surface) dans la lutte du gaspillage alimentaire. Il s’agit d’un ensemble de bonnes pratiques qui sont issues de « l’étude de réduction des impacts des déchets et du gaspillage alimentaire dans la grande et moyenne distribution en Hauts-de-France ».

Prévenir plutôt que guérir, l’adage dit vrai. La prévention du gaspillage alimentaire reste selon nous une des clés fondamentales pour lutter contre ce désastre.

Sources :